Delphine Mazur

Delphine Mazur est née le 08/06/1977 à Saint-Saulve. Son travail provient souvent d’expériences personnelles. Même si sa technique est variée, le dessin à une place prépondérante. Il est omniprésent, mouvant, et il oblige également le spectateur à se mettre en mouvement, à s’approcher au plus près de ses traits de crayon ou de ses encres profondes pour y méditer.
Le papier semble être le palimpseste de ses souvenirs. Il semble avoir plusieurs surfaces, plusieurs couches qui se superposent. Pourtant, l’effet est vibrant, léger, presque évanescent. Le noir devient profond, nous attire dans son abîme.
Entre aveuglement et ombres, on perçoit parfois à peine le travail.
La série les fêlures tirée des écrans de téléphone s’inscrit dans une réflexion sur la mémoire des images et leur devenir à l’ère de la reproductibilité .
Son œuvre se déploie dans un espace paradoxal : entre gravure et dessin, entre lumière et obscurité, entre la main et la machine.
Le fond noir, omniprésent, agit comme une matrice sensible : non pas un vide, mais un réservoir d’images latentes, un négatif où chaque trait blanc fait irruption comme une apparition arrachée à l’ombre.
Le noir, ici, est mémoire. Il conserve, il retient, il contient l’histoire du visible.
Elle interroge ainsi ce que Jacques Derrida, dans Mémoires d’aveugle, appelait la condition paradoxale du regard : voir, c’est toujours affronter une part d’invisible.
Ses dessins naissent de cette tension entre le visible et son effacement.
Ils invitent à une expérience lente, presque méditative, où le regard se construit dans l’ombre et le surgissement.
Comme si l’image, aujourd’hui saturée par sa prolifération numérique, ne pouvait renaître qu’en traversant l’obscurité.